Peut-on retrouver sa vie d'avant, quand on est parent?
On nous l'a tellement dit avant qu'on soit parents... mais on n'en comprend le sens que lorsqu'on a les siens : avoir des enfants, ça change VRAIMENT la vie.
Il y a un avant, et un après, chez tous les parents que j'ai pu croiser.
On a beau tenter de garder le plus possible ses habitudes, et essayer de vivre comme avant, c'est inéluctable : avoir des enfants change profondément la donne.
Une fois parents, impossible de redevenir ceux que l'on était avant, même si on le souhaitait... C'est une expérience qui nous marque au fer blanc, changeant toute notre perspective.
D'abord dans la vie quotidienne, évidemment, parce qu'on réorganise petit à petit sa propre vie au rythme de celle de ses enfants.
Ca débute en fanfare par les horaires stricts de l'allaitement ou des biberons, puis toute l'organisation de nos journées change petit à petit...
Au début on arrive encore à emmener bébé à peu près partout ; puis on en vient naturellement à réorganiser ses journées en fonction de son emploi du temps à lui.
On respecte l'heure des siestes, on avance l'heure des repas, on se cale aux horaires des crèches et nounous, on se met au pli du fameux "tunnel" du soir, et on limite les soirées dehors pour ne pas déstabiliser les enfants... Nos journées deviennent peu à peu très minutées.
Sans compter toutes les nuits pourries et la fatigue accumulée, qui deviennent le lot de tous les parents, ni tous les projets de voyages, d'achats ou tous les choix de vie qu'on met en suspens avec nos enfants...
(Hum. Charmant tableau! On dirait pas, là tout de suite... mais en fait c'est cool quand même d'avoir des enfants, si, si :o)!)
Mais ce sont surtout toutes nos valeurs qui sont complètement bouleversées en devenant parents - on redécouvre la vie avec un oeil nouveau.
On se sent plus concernés par l'avenir de notre monde, parce qu'on sait que nos enfants y vivront après nous ; on remet souvent notre ambition professionelle un peu en question, car notre rapport au travail évolue ; on prend plus de recul sur les futilités, et on est plus facilement émus par les faits divers ou les injustices...
C'est toute notre vision du monde qui est chamboulée, parce qu'on ne pense plus uniquement à soi.
On sacrifie un peu notre égoïsme pour intégrer d'autres personnes à nos choix de vie, et réfléchir plus intensément aux conséquences de nos actes.
Devenir parents, c'est vivre au rythme fou de sa propre vie, et de celle de ses enfants en même temps.
Et donc, multiplier d'autant les expériences. On alterne en permanence entre des moments de fierté et de joie pure, et d'autres de doutes, ou d'épuisement...
D'inévitables montagnes russes, qui nous embarquent en nous laissant bien peu de répit. Et à la longue, ça devient bien plus rock'n'roll, et bien plus fatiguant, que toutes nos folles soirées d'avant.
Alors, avec le recul, on se met à trouver notre vie "d'avant" bien calme et bien légère.
Faire la fête, partir en voyage sur un coup de tête, boire un coup en afterwork, tester le nouveau resto à la mode, partir en virée shopping entre copines, se réveiller naturellement et traîner toute la matinée au lit...
On a une pensée nostalgique envers l'insouciance et la liberté avec laquelle on menait nos vies d'avant, sans avoir eu pleinement conscience de la chance que ça représentait à l'époque.
Ne pas réfléchir aux implications, ne pas anticiper sans arrêt, ne pas se soucier de l'organisation, ne penser qu'à soi, et même - luxe suprême - dormir!... Comme c'était reposant, et comme c'était facile, en fait!
On a parfois cette envie de revenir en arrière, de revivre cette époque "dorée", et de retrouver sa vie d'avant.
L'envie d'échapper aux responsabilités qui sont devenues les nôtres et d'oublier un instant nos contraintes de parents, pour prendre de nouveau la vie avec légereté.
Et puis on réalise bien vite combien ça reste inaccessible... Car nous avons nous-mêmes changé profondément.
Un peu de temps sans nos enfants suffit d'ailleurs à nous mettre face au grand paradoxe parental : quand on les a trop dans les pattes, on en peut plus, on étouffe ; mais dès qu'on retrouve notre liberté... on ne peut en profiter pleinement, vu qu'ils nous manquent terriblement.
Car au delà de toute la spontanéité que nous avons perdue en devenant parents, nos enfants nous ont aussi tellement apporté en échange...
Et si attirant que ça paraisse, ce que nous avons perdu, nous ne pourrions jamais le retrouver, car ce n'est finalement plus ce à quoi on aspire, au plus profond de nous. Cette liberté tant regrettée n'est au final qu'un leurre, car la retrouver ne suffirait sans doute pas à nous rendre plus heureux...
Nos envies changent naturellement, et même si l'on pense avec nostalgie à notre vie d'avant, on n'aimerait pas réellement la retrouver telle quelle.
Et puis tout ne s'arrête pas parce qu'on a des enfants... ça évolue vers des formes différentes.
Avec son conjoint, l'amour passion des débuts, peut laisser place à un lien plus profond, plus doux, et indéfectible. Certains trouvent ça moins romantique, moins fou ; je trouve ça encore plus beau d'arriver à garder le cap quand on est plus "seuls au monde" et qu'il faut parfois se battre pour garder le lien intact.
Être parent impose parfois de se mettre en arrière plan pour ses enfants, mais ce n'est pas pour autant sacrifier sa vie. On peut continuer à prendre un peu de temps pour soi, et ça peut même être l'occasion de faire un point sur ce qui compte vraiment dans sa vie, pour mieux se recentrer professionnellement ou personnellement.
Et avoir des enfants n'empêche pas non plus de continuer à vivre, à sortir et à explorer, même si ça change la façon de le faire.
Les restos entre amis laissent la place aux goûters ou aux brunchs, dont on perçoit enfin aussi le charme tranquille et la gourmandise.
Pour les soirées, on peut toujours trouver une baby-sitter de temps en temps... reste juste à prendre en compte que les lendemains seront encore plus rudes.
Les voyages sont toujours permis! Mais avec un cadre plus précis, un rythme plus doux, en sur des destinations choisies avec un peu plus de contraintes.
Ça n'est pas toujours facile, ni toujours aussi sympa qu'escompté, mais ça se fait encore, être parent n'est pas la fin de tout!
On ne retrouve peut être jamais totalement sa vie d'avant - mais petit à petit on passe à autre chose de plus profond, et de plus apaisé.
Et lorsque nos enfants grandiront, on retrouvera peu à peu notre belle liberté rêvée - en la savourant d'autant plus qu'on en connaît maintenant l'immense valeur.