Lecture - 'Les jours heureux' d'Adélaïde de Clermont-Tonnerre
Lorsque arrive l'été, j'aime partager mes lectures entre romans légers et sagas romanesques.
J'aime en général beaucoup ces grandes fresques épiques, où je peux me plonger totalement dans un milieu, une époque, une ambiance particulière, qu'elle soit moderne ou plus ancienne, au fil de destins hors normes.
Ce sont souvent mes meilleures lectures de vacances, qui souvent mêlent des personnages forts, aux destins aussi riches que tourmentés, à un fond historique documenté que l'on suit sur divers lieux et continents.
Dans le genre, j'avais particulièrement aimé "L'amie prodigieuse", "La femme révélée", ou encore "Les déracinés", dont je vous avais parlé ; mais aussi "Le dernier des nôtres" d'Adélaïde de Clermont-Tonnerre, qui partait à la recherche des racines de son héros Werner, entre l'après guerre en Allemagne et la vie New Yorkaise animée des années 70.
Je me réjouissais donc que le nouveau roman de cet auteur, "Les jours heureux", sorte juste avant l'été : j'en étais sûre, sa plume allait de nouveau m'emporter!
Et ce fût bien le cas, comme je l'avais imaginé... Ou pas tout à fait, justement, car sa nouvelle histoire a réussi à me surprendre par sa modernité.
"Les jours heureux" est difficile à résumer, tant son récit est foisonnant - mais à sa base, il s'agit de l'histoire d'Oscar, "fils de" deux légendes du cinéma français aux amours passionnelles et à la relation explosive, qui tente de réconcilier ses parents lorsqu'il apprend que sa mère entre en phase terminale d'un cancer.
Déterminé à réunir une dernière fois ces deux êtres qu'il aime profondément, et dont il sait qu'ils ne sont pleinement heureux qu'ensemble, malgré leurs différents, Oscar se verra grandir lui-même en explorant toute la profondeur du lien filial unique qui les rassemble.
Le récit, habile et implacablement construit, se densifie au fur et à mesure de la lecture, s'enrichissant de nombreuses thématiques secondaires qui se greffent à l'histoire de ces 3 principaux personnages.
Tel un scénario qu'auraient pu écrire les protagonistes, l'histoire est pleine de rebondissements, emportant son héros comme le lecteur de sommets enivrants en noires abysses.
Le rythme ne faiblit jamais, et la narration fluide sait nous laisser croire à l'attendu, pour finalement mieux nous surprendre, le moment venu.
On se laisse balader avec plaisir au fil des mots ciselés de l'auteur, dont le style fin et percutant rend parfaitement hommage à la beauté des personnages, nuancés et très attachants, et à celle des liens qui les unissent, aussi forts que complexes.
Le roman réussit à mêler dans un récit prenant et cohérent des thèmes extrêmement multiples - en vrac, la filiation, l'idéalisation et le poids du modèle parental, la maladie et le deuil, la célébrité, la création artistique, les dessous du monde du cinéma, la vague "#MeToo", la superficialité des réseaux sociaux, et même l'espionnage...
Un récit intense et très éclaté - sans doute même un peu trop : certains objecteront que l'auteur part dans tous les sens (surtout avec le personnage de Natalya) alors qu'en se concentrant simplement sur la relation entre Oscar et ses parents, amoureux passionnés et passionnants, elle aurait certainement gagné en sobriété, sans pour autant perdre en profondeur.
Mais le talent d'écriture d'Adélaïde de Clermont-Tonnerre a malgré tout réussi à totalement m'emporter dans son histoire, en dépit d'un manque certain de réalisme.
Sous le soleil de Grèce ou du Mexique, ou dans les neiges de Courchevel ou de Russie, j'ai suivi avec plaisir les divagations de personnages flamboyants, principaux comme secondaires.
Nombrilistes, jusqu'au-boutistes, névrosés, secrets, derrière les apparentes paillettes, ils ne sont pas exempts de défauts - mais on éprouve une certaine tendresse à les voir faire petit à petit tomber le masque, et admettre leurs limites, tout en cherchant à les dépasser malgré tout.
Leur aptitude commune à attaquer leur vie de front, quelques en soient les imperfections, sans faire de concessions, force l'admiration.
Les jours heureux n'est au final, ni le récit d'une douce période, ni la nostalgie d'un temps doré qu'on ne trouvera plus ; mais surtout un rappel que les jours heureux sont entre nos mains, quand on accepte d'embrasser pleinement son existence, et de construire son propre avenir avec les cartes qu'on a entre les mains.
De l'amour, des voyages, des secrets... Les ingrédients parfaits d'une lecture de vacances, qui saura certainement accompagner vos jours heureux!