Public ou privé? La première équation à résoudre au collège
Notre recherche immobilière nous place face à un choix auquel nous n'avions pas encore vraiment réfléchi : celui de la carte scolaire, et du choix entre enseignement public et privé.
Un choix qui, quel que soit le côté où l'on penche instinctivement, n'est pas aussi évident qu'il n'y paraît! Alors que Chouquette va faire sa rentrée en 6ème l'an prochain, la carte scolaire du lieu où nous allons déménager va en effet prendre pour nous une importance cruciale.
Nous souhaiterions, dans l'idéal, rester dans le système scolaire public, au sein duquel nos filles ont jusque là fait toute leur scolarité. Nous avons toujours eu de bonnes expériences scolaires, que ce soit pour nous-mêmes comme pour nos filles...
Nous avons donc confiance, a priori, dans le système éducatif national.
Même en ayant conscience, tout de même, de ses (nombreux...) défauts et de ses limites, nous pensons qu'il est important de laisser sa chance au système actuel, pour continuer à lui donner la force et l'ambition qu'il lui faudrait.
Nous sommes par ailleurs confiants dans notre capacité de "suivi", au delà de l'enseignement scolaire de base, pour assurer un accompagnement supplémentaire à nos filles, à la maison, en les aidant aux devoirs, et en ouvrant le champ de leurs perspectives d'apprentissages et de découvertes.
Mais notre recherche immobilière nous place face à une réalité de terrain, que l'on ne réalise pas toujours une fois embarqués dans le quotidien...
Malgré les belles promesses de notre devise nationale, l'égalité face à l'éducation n'est, dans les faits, pas vraiment la même partout.
Et cette inégalité, déjà existante dans une moindre mesure, aux plus petits niveaux scolaires, prend un poids croissant à partir de l'entrée au collège.
C'est d'une part, bien sûr, le moment où l'apprentissage scolaire commence à se complexifier ; mais aussi le moment où, en tant que parent, on doit commencer à lâcher la bride à nos enfants.
Voici venu le temps de l'autonomie : les élèves doivent à présent organiser eux-mêmes leur travail, leur temps, leur matériel, choisir leurs options en fonction de leurs intérêts, souvent aller ou rentrer seuls dans leur établissement, en général plus éloigné de chez eux...
C'est un grand cap à passer : tant pour nos enfants, que cette nouvelle organisation va bousculer, que pour nous, parents, qui devront accepter de leur faire un peu plus confiance, sans pouvoir désormais tout maîtriser à leur place.
Alors, c'est plus rassurant de savoir que cette prise d'autonomie progressive va se faire dans un environnement propice, sur tous les niveaux : scolaire, social, géographique...
C'est ce que tous les parents, dans l'idéal, souhaitent pour leur enfant, et qui donnera le ton de tout le reste de leur parcours scolaire : une sacré pression...
Mais le système public ne permet pas d'avoir la main là-dessus, et impose une carte scolaire, dirigeant chaque élève, en fonction de l'adresse de son domicile, vers un collège de référence.
Dans les petites villes, ça ne fait pas un pli : il n'y a qu'un seul établissement dans les environs, donc tout le monde y va, point.
Mais dans les zones plus densément peuplées, comme ici en région lyonnaise, il y a un plus grand nombre d'établissements, couvrant des zones plus disparates, avec une mixité sociale plus étendue. Les établissements finissent alors par être un peu en concurrence, et par acquérir une certaine renommée, dans le bon comme dans le mauvais sens.
Résultat : on peut être tentés de viser un établissement plutôt qu'un autre, et d'échapper à la carte scolaire qui nous est initialement attribuée.
Par le jeu des dérogations, ou du choix des options, parfois ; mais surtout, depuis que ces possibilités sont plus encadrées, par un recours à l'enseignement privé.
Si les établissements privés étaient autrefois surtout privilégiés par la bourgeoisie aisée, essentiellement pour des raisons religieuses (leur enseignement étant dans la majeure partie des cas liés à une confession précise - majoritairement catholique), ils sont aujourd'hui prisés par un nombre croissant de parents, quelque soit leur niveau social et financier, et sans forcément que le critère religieux ne joue plus un rôle prépondérant.
Certains se tourneront vers le privé par défiance envers le système public et sa qualité d'enseignement, jugée moins élevée ou moins efficace ; d'autres par choix idéologique, pour une discipline réputée plus ferme ; d'autres par simple mimétisme social, dans un esprit "d'entre soi", pas toujours conscient ou assumé.
D'autres encore envisageront cette solution comme un dernier recours, en réaction à une mauvaise expérience scolaire dans le public, par stratégie d'évitement d'une carte scolaire publique jugée défavorable, ou encore pour un choix purement géographique.
Dans tous les cas, se diriger vers le privé imposera d'office une sélection.
Financière, en premier lieu, car ces établissements fonctionnent grâce un droit d'entrée plus ou moins élevé ; et scolaire, également, car les dossiers des élèves y sont regardés en détail avant qu'ils ne soient acceptés.
A la clé, la promesse d'un public sélectionné, encadré et motivé ; et donc, de conditions plus favorables pour étudier, et réussir ses examens.
Les raisons qui poussent des parents à se tourner aujourd'hui vers le privé, sont bien plus variées qu'elles ne l'étaient par le passé...
Et nombreux sont les parents qui, comme nous aujourd'hui, se trouvent confrontés à un dilemme moral, en venant à envisager l'enseignement privé alors qu'ils ne l'avaient pas anticipé.
Pas si facile de faire un choix éclairé... D'un côté, l'envie de faire confiance au système d'éducation public, d'y prendre part, et d'entretenir la mixité sociale qui assure en principe l'égalité des chances. De l'autre, la peur de le faire, dans les conditions auxquelles on est confrontés, au détriment de son enfant, en la tentation de lui offrir, quand on le peut, de meilleures conditions.
Quand son collège de référence a bonne réputation, on ne se pose un peu moins la question. Mais quand celui ci n'est pas très réputé, ou souffre carrément de l'étiquette "REP" ou "REP+" qui lui a été attribuée, on ne sait plus vraiment de quel côté la bascule doit pencher...
C'est le cas par chez nous, d'un côté avec notre carte scolaire actuelle (et son collège "bof bof", pas catastrophique mais pas franchement bien réputé, duquel notre entourage a tendance à se détourner), et de l'autre avec celle des lieux où l'on cherche à déménager (que faire si le collège de référence des biens que l'on convoite a mauvaise réputation? Doit-on complétement éviter la zone, privilégier le privé, ou tenter quand même, sans se fier aux préjugés?).
Et il est bien difficile de trouver des éléments tangibles pour nous aider à trancher.
Pas d'étoiles sur "Schoogle" ou de commentaires sur "School Advisor" sur lesquels se baser! (encore heureux d'ailleurs... d'ailleurs on ne serait pas vraiment plus avancés!) A moins de l'avoir vraiment expérimenté, comment savoir si un collège est "bien" ou non, et s'il conviendra à son enfant?
En écoutant juste les "on-dit", on a souvent l'impression que tel collège est horrible, alors qu'en fait, il est peut-être juste normal. Et d'un autre côté, les établissement privés ne sont pas non plus la garantie du succès! De l'un à l'autre, il y a de grandes différences tant sur les frais d'accès que sur la qualité d'enseignement prodiguée.
A force de vouloir de meilleur pour nos enfants, on devient peut-être démesurément exigeants, sans laisser réellement leur chance aux établissements.
Et à force de vouloir "éviter" son collège de secteur, en basculant sur le privé quand il n'est pas assez réputé, on amplifie le problème en réduisant la mixité sociale qui pourrait justement le réhabiliter.
Le serpent qui se mort la queue... Sortir le porte-monnaie peut parfois sembler la solution, pour nous, sur le moment ; mais ça empire aussi le problème général, dans le fond.
Car si tous les "bons" élèves s'en vont, comment relever le niveau de certains établissements? Ici à Lyon, il y a ainsi des collèges qui ont historiquement mauvaise presse, dans des quartiers défavorisés qui se sont pourtant "boboïsés" avec le temps. Comme les nouveaux venus, effrayés par cette réputation, mettent systématiquement leurs enfants dans le privé, les collèges concernés continuent à être mal classés... alors que leur niveau pourrait au contraire s'améliorer, en même temps que l'évolution du quartier.
Pour autant, le savoir et en avoir conscience ne nous aide pas vraiment... Quelle force ont nos idéaux, face aux réalités du quotidien de nos enfants?
Je veux faire confiance au système public : mais pas si ça se fait au détriment de mon enfant et de son avenir. Mes belles idées ne feront pas le poids.
Chez moi, comme chez de nombreux autres parents, un certain malaise finit alors par s'installer, nos convictions profondes entrant en collision avec la situation pratique que l'on vit avec nos enfants.
Tout cela alors que je suis convaincue qu'il n'y a pas de solution idéale : chaque choix se défend, famille par famille, et au cas par cas... Et c'est ce qui, pour ma part, guidera au final mon choix. En croisant tous les éléments, la localisation du collège, sa réputation, le quartier dans lequel il sera implanté, sa distance avec notre domicile, son coût, s'il y en a...
Tout en me rappelant que j'ai déjà une chance immense d'avoir ce choix, que beaucoup d'enfants, eux, n'ont pas.