Pleure pas, bébé...
A ma grande surprise, depuis quelques temps, ma Comète a grandement amélioré son sommeil. Attention, tout n'est pas encore parfait...
Mais alors qu'elle ne faisait jusque là presque aucune de ses nuits, et ne dormait que très peu en journée, elle multiplie les nuits complètes et se cale sur le rythme "normal" d'un bébé, en, faisant plusieurs vraies siestes dans la journée.
Ça fait du bien! Évidemment, je me réjouis de ces changements positifs, qui me permettent à moi, de mieux me reposer (et plutôt d'avancer dans ma to-do list, soyons réalistes!), et surtout, qui lui permettent à elle de reprendre des forces après les nombreux efforts que son éveil croissant lui demande.
Se tenir assise, faire du quatre pattes, commencer le biberon... C'est fatiguant, à 9 mois! D'un coup, la machine s'emballe, et je crois que son corps a maintenant besoin de récupérer plus profondément, ce qui provoque ce changement de rythme.
Côté sommeil, on va donc clairement vers le mieux! Même si tout n'est pas encore rose pour autant.
Parce que si Comète dort mieux... en revanche, elle s'endort beaucoup moins bien.
Cela fait maintenant plus de 9 mois que je l'allaite - et pendant tout ce temps, elle a pris l'habitude de s'endormir au sein. Une situation pas toujours idéale, même si j'ai longtemps profité aussi de son côté pratique... La mettre au sein, c'était l'assurance d'un endormissement doux et rapide - magique! Tant pour elle que pour moi, ce petit moment câlin était d'ailleurs savouré avec délectation.
Mais maintenant qu'elle grandit, j'aimerais quand même qu'elle apprenne à ne plus uniquement dépendre de moi pour trouver son sommeil, et qu'elle puisse réussir à s'endormir seule, sans artifices, et sereinement (NB: elle n'a ni tétine, ni pouce, ni doudou - seule la poussette réussit parfois à l'endormir).
Alors, quand je la vois fatiguée, et que je repère les signes qui montrent qu'elle a besoin de dormir, je vais la coucher. Je la prend contre moi, je la berce, je la calme, je lui parle, lui explique, et pourtant... Elle se met systématiquement à pleurer, devenant de plus en plus difficile à calmer. Malgré mes tentatives, elle ne s'endort pas encore seule.
Avant qu'elle n'y parvienne, il lui faut tout un rituel : de mes bras, je dois progressivement réussir à la poser délicatement sur son matelas, puis poser ma main sur sa poitrine ; ensuite, retirer doucement ma main, au bout d'un moment, et rester encore un peu à l'observer ; enfin, doucement, à pas de loup, quand elle semble enfin endormie, je sors de la pièce en fermant la porte derrière moi.
Au moindre craquement, grincement, souffle de vent ou changement de lumière durant la manœuvre, patatras : si elle me repère, elle se remet directement à pleurer. Une bombe, prête à éclater.
Un classique, en fait... Où est le problème, me direz-vous? Je peux bien sacrifier quelques minutes de mon temps, pour l'aider à s'abandonner aux bras de Morphée?
Bien sûr, oui - et je le fais sans hésiter. Pourtant, ce moment de l'endormissement devient pour moi de plus en plus difficile à vivre, au moment où je le vis.
Au réveil, pour elle comme pour moi, tout semble oublié : tout sourire, on reprend là on l'on s'était quittées. Mais sur le moment... Les minutes me semblent durer une éternité.
Déjà, parce que le rituel ne fonctionne pas toujours : si quelques instants suffisent à ce qu'elle sombre dans le sommeil, tranquillement, tout va bien! Mais il arrive souvent que ça m'immobilise assez longtemps... et je trouve vite ça terriblement frustrant. Si elle se réveille en cours de processus, il faut tout recommencer, et ça finit souvent par tirer en longueur, ou même, par carrément rater, si elle s'énerve trop.
Je vois pourtant bien qu'elle a sommeil... Mais elle lutte, sans arrêt. Et la sempiternelle répétition de ce cycle, tout au long de la journée, et même parfois la nuit, finit par m'excéder.
Je fais tout mon possible, depuis des semaines déjà, pour la rassurer, l'accompagner, et lui faire comprendre qu'elle peut s'abandonner au sommeil sans craintes et pour son bien.
Mais rien ne change, elle ne s'habitue pas ; et je m'épuise moi aussi de toujours lutter pour ce moment qui, de l'extérieur, est pourtant si banal.
Entre l'envie d'être là pour elle, de la sécuriser et de la guider, et celle de la laisser pleurer, pour lui apprendre à se débrouiller, mon coeur balance, au rythme de ma fatigue, de ma disponibilité et de ma patience.
Je sais pourtant bien, d'expérience, que c'est une phase normale, qui ne durera sans doute pas, et qu'elle finira bien par trouver sa propre façon d'arriver paisiblement d'elle-même à s'endormir.
Seulement, petit à petit, mon réservoir de patience se vide, la douceur me quitte, et la frustration la remplace. Une fois, dix fois, mille fois - je n'ai pas toujours cette force là. Je me sens à la fois impuissante, et presque prisonnière. Comme si en n'arrivant pas à s'endormir seule, et avec ses pleurs, Comète me manipulait, et m'obligeait à rester sans arrêt près d'elle, parfois contre mon gré.
Oh, que l'on se comprenne : je sais bien, bien sûr, que ce n'est pas le cas. Non, par son comportement, elle ne cherche pas juste à m'amadouer, mais à me faire comprendre son besoin de proximité et de sécurité. Je le respecte, et j'essaie de le combler ; mais il m'épuise, et me pèse parfois.
Si je trouvais ça normal quand elle n'était que nouveau-né, maintenant qu'elle grandit, je ne peux m'empêcher d'y voir un comportement quelque peu tyrannique. Non, elle ne le fais pas EXPRÈS ; mais oui, elle M'IMPOSE quand même sa volonté, par une sorte de chantage auquel il m'est difficile de plier. Ce n'est peut être pas sa réalité ; mais c'est celle que je ressens, quand à chaque fois que je l'endors, elle m'oblige à rester, ou à souffrir de l'entendre pleurer.
Rien de nouveau, pourtant... J'ai déjà vécu cela, par deux fois - mais je n'en garde néanmoins pas la même impression qu'aujourd'hui.
D'abord parce que cette phase était sans doute passée plus vite pour ses aînées...
Mais surtout, car je me sentais alors moins tiraillée par l'injonction qu'on nous renvoie aujourd'hui sans cesse : on ne laisse pas pleurer un bébé.
Pour ma grande, j'avais appliqué, avec succès, la fameuse méthode "5-10-15", aujourd'hui un peu controversée : laisser pleurer bébé quelques minutes, revenir le rassurer, puis le laisser de nouveau, un peu plus longtemps, avant de revenir encore, etc jusqu'à ne plus revenir. Au bout d'une semaine éprouvante pour mon coeur de maman, c'était plié.
Pour ma cadette, c'était plus difficile : je n'osais plus trop la laisser pleurer, de peur de gêner sa grande sœur. La journée, elle s'endormait assez facilement ; mais, la nuit, je venais systématiquement lui donner le sein ou la garder dans mes bras, en silence, jusqu'à ce qu'elle se rendorme. Elle a mis près de 3 ans à dormir de vraies nuits complètes.
Je n'en tire aucune conclusion : tout cela ne tient pas qu'à la manière dont je m'y suis prise, il n'y a pas selon moi de "bonne méthode" pour accompagner l'enfant au sommeil - juste un fonctionnement propre à chaque enfant, selon ce qu'il est et ce qu'est alors notre environnement. Ce qui avait marché pour ma grande, n'a pas fonctionné pour ma 2ème ; et pour ma 3ème, c'est encore différent.
J'ai aujourd'hui moins de temps à consacrer à son endormissement, pressée par le temps que je dois consacrer à ses sœurs, à l'organisation de la maison, ou encore à moi-même, pour préserver mon énergie... Je suis sans doute plus impatiente, et plus exigeante, aussi.
Chaque minute de son sommeil m'est pour l'instant précieuse, et en général bien rentabilisée - alors j'y tiens, d'autant plus qu'elle m'en a plutôt peu laissé l'occasion d'en profiter jusqu'ici. Ce n'est peut-être pas l'opinion dominante, qui voudrait aujourd'hui être entièrement et uniquement tournée vers l'enfant au détriment de soi-même ; mais c'est ma réalité de mère de 3 enfants.
Et c'est sans doute là que se trouve une partie de mon mal-être actuel, ou, comme le mot est tout de même trop fort, de mon inconfort.
Car que je reste auprès de Comète pour l'endormir, ou que je la laisse pleurer, j'ai l'impression de mal faire.
Ceux qui te disent "il faut la laisser pleurer, ne surtout pas céder", comme si c'était une solution facile et évidente, n'ont pas l'expérience ou plus le souvenir de ce que ça représente, pour une mère... Je crois pourtant fermement, comme eux sans doute, qu'il faut parfois laisser pleurer son enfant ; certains ont besoin de ces pleurs de décharge pour évacuer la pression et trouver la sérénité nécessaire à leur sommeil.
C'est si facile à dire, quand on a pas les cris de son enfant en tête... Mais c'est vite oublier combien ceux-ci de son enfant vous vrillent le coeur et le cerveau, en tellement peu de temps... 2 petites minutes semblent déjà une éternité, tant les cris résonnent en nous, en ligne directe avec nos émotions. Alors laisser durer... c'est une petite torture.
Mais je réalise en même temps le poids écrasant qu'ont pris en parallèle les doctrines bienveillantes, sur les réseaux sociaux et dans la société actuelle, et combien elles peuvent être culpabilisantes.
On nous répète à longueur de temps qu'on "ne laisse pas pleurer son bébé", qu'il faut être là pour lui, aimante et dévouée, tout le temps prête à s'adapter pour le rassurer, le cajoler, le materner. Un message largement martelé, sans discernement ni nuances : car laisser pleurer un nouveau né pendant une demi-heure, ce n'est pas la même chose que de laisser pleurer un bébé d'un an une petite dizaine de minutes, après lui avoir expliqué.
Mais le message qui passe chez les mères, c'est uniquement "il ne faut pas" ; et cela laisse des dizaines de situations où l'on le sent coupables, nulles, en faute, alors qu'on n'a pourtant rien fait de mal, et que bébé n'aura pas pour autant de traumatismes.
Comment dès lors ne pas se sentir minable quand on ose laisser pleurer son bébé, ne serait-ce qu'un peu, parce que rien d'autre ne fonctionne? Comment ne pas croire que, sûrement, on ne sait pas s'y prendre, qu'on baisse juste prématurément les bras, ou même carrément, qu'on n'aime peut être pas assez son bébé? Une torture sans doute encore plus insidieuse que quelques pleurs à notre oreille.
Je suis pourtant droit dans mes bottes : je sais à quel point j'aime ma fille, et que je fais toujours de mon mieux, avec les cartes que j'ai en main, au moment donné.
Je ne cherche pas à être une mère parfaite, ni à remplir les cases d'un dogme quelconque...
Et surtout, c'est avant tout ma fille que je cherche à convaincre, et personne d'autre. Peu m'importe le jugement, si ce n'est celui que je porte sur moi-même.
Mais tourmentée entre mon envie d'être là pour elle, et en même temps, de la laisser apprendre à gérer seule, je finis par être totalement perdue. Et pas loin de penser que du coup, Comète l'est aussi ; ce qui n'aide sans doute pas à ce que la situation aille vers le mieux.
Bien sûr, ça viendra. Comme pour son sommeil qui un jour semble s'être débloqué, on trouvera la clé. Elle comme moi, on tâtonnera, et un jour, sans qu'on comprenne comment ni pourquoi, elle s'envolera sans sourciller dans les bras de Morphée.
Mais d'ici là, je dois l'avouer, je ne sais pas sur quel pied danser, ni quelle posture adopter. Et lâcher prise sur ce point m'est plus difficile que je ne l'aurais imaginé. Sans doute parce qu'après tout, ça ne dépend pas vraiment de moi...
Il faudra que j'attende que Comète, d'elle-même, se sente suffisamment en confiance pour s'abandonner au sommeil, sans rituel.
D'ici là je prendrai mon mal en patience... Et rassurez-vous quand même : ça ne m'empêchera pas de dormir, moi!^^