Doit-on avoir peur d'Halloween pour nos enfants?
En quelques années, la fête d'Halloween est devenue un incontournable, en prenant sur le net et les réseaux sociaux une ampleur inattendue.
Si j'ai eu connaissance des coutumes d'Halloween alors que j'étais moi-même encore enfant, à l'époque, ça n'était absolument pas fêté en France et restait pour moi un folklore exclusivement anglo-américain.
Je ne me suis donc jamais déguisée en sorcière pour aller faire le tour des maisons du quartier avec les copains, en criant "des bonbons ou un sort!", ni même n'ai mis en place de décorations spécifiques à cette période.
Je ne suis pourtant pas si vieille, mais depuis, ça a bien changé! Alors que je devenais jeune adulte, la fête a commencé par se développer un peu, mais de façon très limitée...
Durant quelques temps, nous avions fini par prendre l'habitude de prévoir un paquet de bonbons pour le soir du 31 octobre, histoire de ne pas être pris au dépourvu par les quelques enfants qui toquaient désormais à la porte, leur petit panier à la main.
Pour autant, ça n'a duré que 2-3 ans... avant que nos bonbons ne finissent par rester au fond du tiroir, faute d'enfants pour les réclamer. La sauce n'avait pas pris.
Mais depuis quelques années, on sent que la machine est relancée, grâce à l'influence des réseaux sociaux et leur esthétique soignée.
On y trouve en effet ces jours-ci une foule de décors sophistiqués, de maquillages flippants et de déguisements horrifiques ; et en parallèle, les animations spécialement créées autour du thème se multiplient et marchent de mieux en mieux.
Défilés et décorations spéciales dans les parcs d'attraction, escape games en forme de manoir hantés, cueillette de citrouilles et fabrication de lanternes, labyrinthes, jeux de piste...
En quelques années, l'événement est même devenu le point culminant des premières vacances scolaires de l'année, prenant finalement le dessus sur la fête de Toussaint, qui est pourtant traditionnellement à leur l'origine.
Il faut bien avouer que pour des enfants, jouer à gentiment se faire peur dans des décors ludiques reste quand même plus fun que de suivre docilement les adultes dans de vrais cimetières, dans une ambiance parfois pesante...
Avec les années, l'ambiance mi-terrifiante mi-ludique d'Halloween a donc d'abord conquis massivement les réseaux sociaux, avant de réintégrer la vie quotidienne.
Et on fait maintenant face à une surenchère de décos et d'effets spéciaux - c'est à qui fera le plus d'efforts pour décorer son intérieur et démontrer son sens de la fête.
Halloween revêt en effet un caractère très visuel, basé sur tout un imaginaire tiré de contes et de films d'horreur qui ont imprégné nos esprits d'adultes.
L'occasion d'un déferlement de sorcières et de fantômes, de squelettes et de têtes de mort, d'araignées et de chauve-souris, de tombes et de grande faucheuse, et plus récemment, de maquillages inspirés du "Dia de lors muertos" mexicain, popularisé auprès des enfants par le film Disney "Coco".
Une ambiance globalement sombre, pourtant récupérée avec beaucoup de créativité par les influenceuses : mises en scène somptueuses, maquillages et déguisements bluffants, recettes de cuisine revisitées, activités manuelles à faire en famille... Il y en a pour tous les goûts, du plus effrayant au plus rigolo.
Il est aujourd'hui facile de trouver une foule d'idées autour de la fête, notamment sur Pinterest, ce qui en fait une occasion idéale pour occuper les enfants lors des vacances de la Toussaint.
Pas étonnant donc que beaucoup s'en donnent à cœur joie et jouent le jeu à fond!
Malgré tout, pour tout vous avouer, de mon côté je n'arrive pas vraiment à accrocher à cette fête.
Je crois que c'est surtout parce qu'elle n'est pas issue de notre culture - si elle me semble tout à fait légitime dans les pays anglo-saxons, je ne peux m'empêcher de la trouver ici un peu trop superficielle et bien trop guidée par le marketing.
C'est un effet de communication qui nous a imposé cette fête, elle ne correspond pour nous à rien, hormis aux représentations qu'on en a vues à l'étranger... Comme pour toutes les grandes fêtes, sa récupération commerciale était inévitable - et je ne la juge pas forcément néfaste, tant qu'on arrive à garder, de notre côté, une certaine mesure.
C'est par exemple autant le cas à Noël, dont j'adore pourtant l'ambiance - mais il faut bien avouer que ça me parle alors beaucoup plus, d'une part parce que l'ambiance est alors plus chaleureuse et bienveillante, mais surtout parce que la période de Noël résonne encore de mes propres souvenirs d'enfance.
Alors que pour Halloween, je n'ai pas ce sentiment de partager une part de ma propre expérience avec mes enfants.
Par ailleurs, le propre d'Halloween est de beaucoup jouer sur la peur, qui ne me semble pas être la valeur la plus utile à mettre en avant auprès des enfants.
Je ne veux pas non plus passer pour une rabat-joie rétrograde... Je suis bien consciente qu'on est pas forcément obligés de donner à l'événement une tournure effrayante, et qu'on peut rester en famille dans un esprit plus "bon enfant" que gore.
On ne fera pas la même chose de la fête avec un enfant en bas-âge ou avec un pré-ado - c'est à nous de déterminer ce qu'on souhaite mettre en avant, et ça peut justement être l'occasion de dédramatiser un peu...
Mais quoi qu'on en fasse, avec la démocratisation de l'événement, les tout-petits sont quand même inévitablement confrontés à cette période à une esthétique effrayante, à laquelle certains peuvent être assez sensibles. D'autant plus qu'on ne se rend pas toujours compte, en tant qu'adultes, à quel point des détails qui nous semblent tout bêtes peuvent faire peur à nos enfants...
Je me rappelle ainsi avoir déguisé Chouquette, lors de sa 1ère année de maternelle, pour la "fête orange" de son école. Conformément aux consignes des enseignants, j'avais évité tout costume effrayant et je lui avait trouvé une mignonne robe de "sorcière" bien innocente, colorée, dont elle était ravie.
Pour parfaire le déguisement, j'ai eu l'idée, juste avant de partir, de lui maquiller au crayon khôl une petite araignée dont le fil descendait sur sa joue... Erreur fatale! Grosse crise de larmes en se regardant dans le miroir - elle en avait été terrorisée, et j'avais dû la démaquiller et la rassurer en catastrophe.
C'était pourtant parti d'une bonne intention... je n'avais pas du tout réalisé que malgré son enthousiasme, elle avait quand même un peu peur!
Je crois qu'il ne faut pour autant pas non plus voir tout en noir (pas plus que tout en orange!).
Certes, à titre personnel, je n'arrive pas trop à accrocher à l'univers d'Halloween ; mais je ne suis au final ni pour, ni contre. Je ne serai juste du coup pas la plus prompte à m'emballer et à réorganiser mon quotidien pour l'occasion.
Comme mes filles sont maintenant demandeuses, je compte quand même faire quelques efforts pour leur faire plaisir, et leur donner l'impression de ne pas passer à côté de la fête...
Elles auront donc le droit, si elles le veulent, de sortir déguisées pour l'occasion (même si je n'ai pas spécifiquement acheté de costume à thème) ; je préparerai certainement des petits gâteaux décorés et des bonbons pour le goûter ; nous ferons ensemble quelques activités manuelles si elles ont envie, et nous irons peut-être en famille nous balader parmi les grosses citrouilles qui décorent en général le parc de la tête d'or....
Mais je ne suis pas prête à investir pour complètement redécorer ma maison, à les laisser récolter des bonbons dans tout le quartier, et encore moins, vu leur âge, à leur laisser regarder des films qui font peur.
En tant que maman, Halloween ne me fait pas peur pour autant... Je comprends tout à fait qu'on ait envie de profiter de l'occasion pour en faire un moment festif, au cœur d'un automne parfois un peu déprimant, entre pluie et nuit omniprésente.
Je n'arrive juste pas encore à entrer totalement dans le délire... Mais peut-être que dans quelques années, après avoir créé de beaux souvenirs avec mes filles, je finirai par y venir!